Les techniques emprisonnent, les principes libèrent


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Les traditions martiales se transmettent à travers des formes. D'où qu'elles viennent et de tous temps. Si l'une des modes actuelles est à la prétendue absence de techniques, formalisme et rituels, même une observation superficielle permet de constater qu'il n'en est rien. Oui les coutumes peuvent prendre d'autres formes, oui l'enseignement technique peut être limité et ouvert, mais tous ces éléments restent présents. Car si les principes représentent le fond, ils ont besoin du support que sont les techniques pour être transmis. Le danger à éviter est d'en rester prisonnier.
Kono Yoshinori (photo Hélène Rasse)
Kono Yoshinori (photo Hélène Rasse)
Prisonnier de la technique
Les traditions martiales japonaises se sont, probablement plus que toutes autres, reposées sur des formes, katas, pour transmettre des savoir-faire. Et cette façon de faire a prouvé son efficacité à travers le temps. Non parce qu'elle était la meilleure. D'autres limitant l'importance des formes ont passé l'épreuve des siècles et prouvé que la proportion des ingrédients pouvait être variable. Simplement, bien comprise, cette méthode de transmission fonctionne. Point.
Mais toute la difficulté est de comprendre comment fonctionne cette méthode, car une mécompréhension dans le domaine de la pratique martiale peut nous amener à développer un sentiment de compétence dans le combat qui peut nous être très, très dommageable. Avant tout il convient de comprendre que la maîtrise technique n'est PAS le but de la pratique martiale. C'est un simple moyen d'intégrer les principes qui sont l'essence de l'école/art que l'on étudie.
Hino Akira (photo Hélène Rasse)
Hino Akira (photo Hélène Rasse)
La situation martiale est imprévisible. Et elle l'était d'autant plus à l'époque des bushis qui cachaient jalousement leurs techniques. En raison de leur efficacité naturellement, mais aussi car il est beaucoup plus difficile d'agir efficacement face à une situation inconnue, à des mouvements ne faisant pas partie de notre champ d'expérience. Que l'on se souvienne de la supériorité temporaire mais écrasante des Gracie lorsque leur méthode était inconnue ! Aujourd'hui le Jujitsu brésilien est reconnu comme une méthode de combat efficace avec ses spécificités, ni plus ni moins que les autres. Simplement elle avait un avantage phénoménal lorsqu'elle était méconnue de la concurrence.
Le combat de survie où tout est permis étant par définition un saut dans l'inconnu (le combat rituel est une toute autre histoire que je n'aborderai pas aujourd'hui), aucun catalogue technique ne pouvait prétendre à présenter des solutions pour chaque situation, leur nombre étant sans limite. Le cursus d'une tradition martiale visait donc à sélectionner un ensemble de situations génériques qu'il convenait ensuite d'explorer, creuser, triturer pour se l'approprier. Se limiter à répéter ad nauseam un "programme officiel" est ainsi le plus répandu des culs de sac des Budos / Bujutsus. Etre prisonnier de la technique, c'est rester bloqué à la première étape de la transmission shu / ha  / ri, celle de la copie. Celle de l'enfant qui imite son père.
Kuroda Tetsuzan à la NAMT, Nuit des Arts Martiaux Traditionnels
Kuroda Tetsuzan à la NAMT, Nuit des Arts Martiaux Traditionnels
Pourquoi le kata
Les traditions martiales japonaises s'appuient sur des katas. Ces mouvements uniques (Judo, Aïkido, …) ou ces enchaînements de techniques (Kenjutsu, Jujutsu, …) réalisés par de véritables experts démontrent une efficacité incroyable. Malheureusement ils ne fonctionnent que de façon très superficielle si ils ne sont pas sous-tendus par une modification de l'utilisation du corps. C'est pourquoi même si le nombre de formes qui composent le cursus d'une école est limité, il est essentiel.
Dans les Koryus les katas étaient enseignés dans un ordre très précis, mettant l'adepte face à des difficultés croissantes. L'élève ne se voyait d'ailleurs enseigner les étapes suivantes que si il avait surmonté les difficultés des précédentes, et intégré les subtilités qui les rendaient efficientes. Les armes étaient enseignées dans un ordre défini, de même que les katas. Un kata supérieur n'avait pas plus de chance d'être réalisé par un pratiquant n'ayant pas maîtrisé les fondamentaux, que la théorie de la réalité d'être comprise par quelqu'un qui ne maîtrise pas les additions et soustractions.
Akuzawa Minoru (photo Pierre Sivisay)
Akuzawa Minoru (photo Pierre Sivisay)
Dans certaines écoles tous les principes étaient présents dès le départ mais à des niveaux "basiques", tandis que d'autres les révélaient au fur et à mesure. Le point commun était la progressivité de l'enseignement. A ce titre on ne peut que déplorer le choix de maîtres qui, pour des raisons financières ou de préférence personnelle, enseignent les formes à des pratiquants qui n'ont pas maîtrisé les niveaux antérieurs, soit font travailler les katas dans un ordre totalement aléatoire. Leur vision à court terme représente une menace pour la survie de leur école car ses pratiquants sans maîtrise ne sont plus capables de démontrer la moindre efficacité, et ils font en outre courir un risque aux élèves qu'ils entretiennent dans l'illusion.
Tamura Nobuyoshi
Tamura Nobuyoshi
Aïkido et Daïto ryu
Si l'Aïkido puise ses racines dans plusieurs écoles, la majeure partie de son catalogue technique est issu du Daïto ryu. Cette école mystérieuse fondée par Takeda Sokaku, a pour caractéristique d'avoir un catalogue technique plus qu'étendu, dont de nombreuses formes semblent avoir été créées pour illusionner les pratiquants. Si j'aborderai ce sujet dans un article à part entière, je me contenterai d'indiquer que :
-cela ne remet en aucun cas en cause la valeur de l'école,
-cette opinion est le fruit de réflexions et d'échanges avec de nombreux experts de Daïto ryu et de chercheurs sur cette discipline,
-si peu prennent le risque de le dire à voix haute, beaucoup en privé et même aux plus hauts niveaux du Daïto ryu l'évoquent.
Ueshiba Moriheï opéra dans son enseignement un retour aux sources dans le sens où il épura le catalogue du Daïto ryu de mouvements farfelus, et transmis un cursus restreint comme dans les Koryus. Charge aux pratiquants, comme à l'époque des Bushis, de se l'approprier en l'explorant après en avoir maîtrisé les fondements. Restent toutefois les écueils de l'ordre dans lequel les techniques doivent être étudiées, de la définition des principes et stratégies transmis, etc. Les pratiquants d'Aïkido et Daïto ryu ont ainsi entre leurs mains un trésor à l'état brut… qui ne permet rien s'il n'est purifié, raffiné. Une tâche titanesque.
Ueshiba Moriheï, uke Tamura Nobuyoshi
Ueshiba Moriheï, uke Tamura Nobuyoshi
Explorer pour se libérer
Le catalogue technique est donc l'outil qui permet de se confronter aux énigmes corporelles qu'est l'efficacité extraordinaire des grands adeptes. Un véhicule nous permettant d'accéder aux principes qui, seuls, sont garants d'une évolution, et donc efficacité, profondes. Malheureusement trop d'adeptes des traditions martiales japonaises, en particulier de l'Aïkido, se contentent de répéter le catalogue de leur école comme des hamsters courant dans une roue.
L'époque est à la simplification. Ce qui est simple se comprend aisément, mais peine à retranscrire la réalité complexe de notre monde. Et l'absence de nuances polarise, donnant naissance dans les domaines les plus divers à un intégrisme déplorable synonyme de régression. Et la pratique martiale n'y échappe pas. La mesure est essentielle. Dans la culture guerrière japonaise paradoxale, les Budos / Bujutsus s'appuient sur le carcan de la technique pour amener l'adepte à la liberté, la spontanéité. Mais tous n'arrivent pas à s'en libérer…
Les techniques emprisonnent, les principes libèrent
Les techniques emprisonnent, les principes libèrent

Iaito ou katana ?

 
Avec quelle arme peut-on pratiquer le iaido Iaito (sabre d’entraînement non tranchant) ou katana (sabre en acier tranchant) ?

Le iaito

L’origine du iaito est assez récente et remonte aux années 1960. Son invention fait suite aux lois interdisant le port d’arme au Japon et restreignant drastiquement la fabrication des katana. C’est dans la région de Fukuoka que naît le premier iaito. Il est composé d’une lame en alliage, solide et non aiguisable. Après des années de recherche et de travail, le iaito est aujourd’hui une réplique de grande qualité d’un katana. Seul la lame en alliage d’aluminium moulé diffère pour s’adapter à la réglementation nippone.
Toutes les lames proviennent de la même fonderie, dans la région de Gifu. Après avoir été fondu, la lame brute est ensuite polie à l’aide de meules et poncées à la main. La lame est ensuite chromée, ce qui la protège des rayures et de la rouille. Enfin, le hamon (ligne de trempe) est réalisé par dépolissage au papier de verre.
Les lames des iaito sont standardisées ce qui permet de disposer d’un stock prêt d’avance. Une telle arme coûte entre 200 et 1000€ selon la commande, bien moins qu’un katana que l’on trouve rarement en-dessous de 1 000€ et dont le prix peut monter très haut. La lame étant chromée, celle-ci est protégée de la rouille.

Le katana

Le katana est le sabre traditionnel en acier utilisé par les samourais et les bushis au Moyen-âge. Considéré comme « l’âme du samourai », le katana est devenu un objet mythique tant pour les Japonais que pour les Occidentaux. De très grande valeur, il est l’objet qui permet de défendre sa vie sur le champ de bataille ou lors de duels. À partir de l’ère Edo cependant, période du Japon unifié, les sabres fabriqués ne sont généralement plus destinés au combat et nombre d’entre eux constituent des sabres d’apparat, tranchants certes, mais dont la plupart n’a jamais servi.

Notre pratique au Meibukan

Au dojo, les débutants commencent leur apprentissage du iaido avec un iaito. Moins cher, parfois plus léger et donc plus maniable, et surtout non tranchant, le iaito constitue une arme parfaite pour débuter. Il permet d’apprendre sans couper son saya (fourreau) et sans se trancher les doigts au passage…
Dès que le niveau le permet, les élèves de l’école pratiquent avec des gendaito ou shinken, c’est-à-dire des sabres modernes en acier, aux lames aiguisées. Nous ne pratiquons pas avec des katana anciens, témoins du passé à conserver précieusement pour ne pas risquer de les abîmer.
La pratique avec de vrais katana, et non avec des iaito permet une pratique au plus près de celle des samourais. La lame tranchante demande une grande rigueur et une précision accrue dans sa pratique pour préserver son fourreau et ses doigts. De plus, une lame en acier demande un entretien minutieux pour empêcher la rouille d’attaque la matière. Cet entretien peut être vu comme une contrainte, mais également comme un instant agréable où l’on prend le temps de se recentrer sur l’arme et moins sur la pratique, et où l’on peut admirer la lame et le travail incroyable de forge, de polissage, de trempage, etc.

Boxe : pas de miracle pour Carlos Takam face à Anthony Joshua

Samedi soir, le Franco-Camerounais affrontait à Cardiff la star des poids lourds avec l’espoir de devenir champion du monde. L’arbitre a arrêté le combat au 10e round.
Carlos Takam (à gauche) a tenu dix rounds face à la terreur Anthony Joshua qui a gagné tous ses combats par KO.
Carlos Takam (à gauche) a tenu dix rounds face à la terreur Anthony Joshua qui a gagné tous ses combats par KO. ANDREW COULDRIDGE / Action Images via Reuters

Carlos Takam s’attaquait à un monument samedi 28 octobre au Principality Stadium de Cardiff (Pays de Galles). Le boxeur franco-camerounais de 36 ans, inconnu du grand public, défiait le poids lourds anglais Anthony Joshua, star du noble art et détenteur de trois ceintures mondiales (IBF, WBA, IBO, trois fédérations de boxe). L’arbitre a arrêté le combat à la 10e reprise, validant la 20e victoire par KO en 20 combats pour le Britannique.

Compte tenu des circonstances, la performance de Takam reste remarquable. Il a remplacé au pied levé le challenger programmé de Joshua, le Bulgare Kubrat Pulev, officiellement blessé à l’épaule. Avec seulement douze jours de préparation chez lui à Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis), Takam a tenu dix rounds face au champion olympique 2012. Une seule des dix-neuf victimes précédentes de Joshua y était parvenue et pas n’importe qui : Wladimir Klitschko, géant de la discipline mis K.O à la 11e reprise en avril.

Blessé à l’arcade

Joshua, soutenu par le footballeur Zlatan Ibrahimovic, venu le saluer dans le vestiaire, ou encore par le maire de Londres Sadiq Khan qui l’a encouragé sur Twitter, avait aussi les 70 000 spectateurs de son côté. Il a contrôlé l’affrontement, touchant Takam à l’arcade dès la 4e reprise. Le Franco-Camerounais, envoyé une fois au tapis, a tenu le choc mais devant le sang qui coulait de sa blessure et les coups encaissés, l’arbitre a décidé d’arrêter le combat, à la grande colère du clan français. Le boxeur né à Douala peut se consoler avec la bourse la plus garnie de sa carrière.
« L’arbitre m’a stoppé, je ne sais pas pourquoi », a regretté Takam au micro de SFR Sport. « J’étais en train d’esquiver, je ne sais pas. S’ils m’avaient arrêté, car le docteur a dit que je me suis coupé, j’aurais pu comprendre... », a ajouté le boxeur dont le courage a été salué par son adversaire et le public.

19è siècle... les derniers samouraïs !


Le temps des samouraïs est révolu depuis longtemps. Mais ces guerriers japonais ont laissé derrière eux une légende bien vivace… et quelques photos d’exception ! A la fin des années 1800, les derniers samouraïs ont en effet vécu les premières heures de la photographie… et les images qui en résultent sont fascinantes.
Pendant près de 700 ans, les guerriers samouraïs ont dominé la société japonaise. Leur règne sans partage sur l'empire féodal du soleil levant ne s’est éteint qu’à la fin du 19è siècle avec, sous l’ère Meiji, la création d’une armée nationale de type occidental.
Aujourd’hui, pour se replonger dans la passionnante histoire des samouraïs, il reste bien entendu les livres d’histoire et les dessins d’autrefois… mais il y a aussi les photos de ces derniers représentants d’une classe guerrière.
Témoins malgré eux de la fin d’une époque glorieuse, on les observe portant fièrement leurs armures, leurs katanas, leurs tatouages et leurs coiffures… Des photos magnifiques.
Source : Universal history archive
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Source : Felice Beato
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Source : Imagno
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Source : Kusakabe Kimbei
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Source : Felice Beato
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Quand l’histoire se mélange à l’art photographique et à la découverte d’autres cultures, ça ne peut que susciter quelques émotions. Superbe !
Pour ceux qui veulent aller plus loin sur le sujet :
Derniers témoins d’une époque, 20 samouraïs posent face aux premiers appareils photos du Japon.

Onna-bugeisha, les femmes japonaises pouvaient aussi être samouraïs !



onnabuL'image que l'on a de la femme japonaise est souvent la même : une silhouette élégante, enveloppée dans un kimono épais qui l'oblige à marcher à tout petit pas. Un visage de nacre, entièrement recouvert de blanc à l'exception des lèvres peintes dans un rouge vif et des yeux cernés de charbon noir qui intensifie le regard et donne à l'ensemble une aura quasi-divine. On imagine une geisha raffinée qui sert le thé, joue du koto, fait la conversation ou une femme au foyer qui s'occupe des enfants, attend sagement son mari et lui sert le repas lorsqu'il rentre d'une journée de travail épuisante.

Comme dans beaucoup d'autres sociétés, la femme japonaise a très peu eu l'occasion de se démarquer des hommes. Reléguées au second plan des livres d'histoire, dévalorisées, la femme japonaise ne semble avoir d'autres choix que de briller d'un faible éclat dans l'ombre des hommes qui se glorifient au travers des images de faits de guerre ou autres aventures trépidantes.
Pourtant, une poignée de femmes a fait fi de leur genre et a pris les armes. Au Japon, elles sont bien connues, mais en occident on entend rarement parler d'elles. Il est temps de combler cet injuste oubli de l'histoire japonaise que sont les onna-bugeisha.  

Les onna-bugeisha : armes et talents  

Les onna-bugeisha étaient entraînées pour utiliser le naginata, une arme iconique de cette période. La version du naginata utilisée par les femmes guerrières était connue sous le nom de "ko-naginata", un peu plus petit que le "o-naginata" utilisé par les hommes. Elles utilisaient aussi des kaiken, un petit sabre qui ressemble fortement à un couteau ou une dague.
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Naginata
Habituellement, le kaiken était utilisé pour se défendre dans des endroits étroits et confinés où les mouvements de la guerrière sont limités, mais aussi en cas de suicide. Il était traditionnel qu'une onna-bugeisha porte toujours un kaiken sur elle lorsqu'elle se déplaçait en compagnie de son mari. 

Kaiken
En terme de technique, les femmes samouraï maîtrisaient le Tantôjutsu, un art martial auquel elles s'entraînaient depuis leur plus jeune âge et qui existe toujours aujourd'hui.
On attendait des onna-bugeisha qu'elles soient capables de défendre le foyer et la famille des jours durant s'il le fallait, c'était leur rôle principal. Leur entraînement leur permettait donc de se battre sans relâche pour remplir leur devoir.  

Le début des onna-bugeisha

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Impératrice Jingu
La première onna-bugeisha connue serait l'impératrice Jingu. Après avoir provoqué des changements économiques et sociaux dans la société japonaise, elle aurait conduit l'invasion de la Corée vers l'an 200 auprès de son mari l'empereur Chuai. La légende raconte qu'elle aurait conquis la Corée sans verser une goutte de sang. Il est tout de même important de noter que son existence est sujet à controverses, néanmoins, ce sera la première femme à figurer sur un billet de banque japonais en 1881 !

Tomoe Gozen
Entre 1180 et 1185, le Japon était déchiré par une guerre intestine qui opposait les deux grands clans de Minamoto et Taira : la guerre Genpei. Celle-ci se termina par une victoire du clan Minamoto et marqua le début de l'ère Kamakura. Cette guerre est contée dans le célèbre ouvrage de la littérature classique japonaise : le Heike monogatari. Dans ce dernier, on nous raconte l'histoire de Tomoe Gozen, une très célèbre onna-bugeisha. 
Elle était décrite comme étant dotée d'une intelligence, d'une beauté et d'un talent incomparable. Maniant l'arc avec talent, c'était une très bonne cavalière, une excellente politicienne et elle maîtrisait également le Katana à la perfection. Son habileté au combat faisait d'elle l'égale des plus grands samouraïs hommes de son temps et ses prouesses en tant que général étaient reconnues à travers tout le Japon. Le maître du clan Minamoto disait même d'elle que c'était le premier vrai général du Japon.
Tomoe Gozen s'est illustrée au combat de nombreuses fois. Elle aurait guidé une armée de seulement 300 samouraïs contre 2000 guerriers et fut l'une des cinq derniers survivants de la bataille. En 1184, durant la bataille d'Awazu, elle décapita un célèbre guerrier du clan Musashi, Honda no Moroshige, après avoir remporté la victoire.
Elle aurait également fondé sa propre école pour apprendre aux femmes à se battre. Même si son sort durant la bataille d'Awazu reste flou, l'histoire de Tomoe Gozen a traversé les âges et reste célèbre encore aujourd'hui. Elle est devenue un véritable phénomène culturel et est le symbole de la force des femmes samouraïs.
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Hangaku Gozen
En 1201, une autre femme samouraï s'est faite une bonne place dans l'Histoire japonaise : Hangaku Gozen, une belle et talentueuse commandante qui dirigea une armée de 3000 hommes pour défendre le fort de Torisakayama avec son neveu Jo Sukemori. Malheureusement pour eux, le camp d'en face, Hojo, les dépassait largement en nombre, puisqu'il était fort de 10 000 hommes. A dos de cheval et armée de son ko-naginata, Hangaku fut blessée durant la bataille, mais sa férocité impressionna tant ses adversaires que nombre d'entre eux la demandèrent en mariage. 
tomoe
Entre le 15ème et le 17ème siècle, durant la période Sengoku, l'image de la femme samouraï changea considérablement. En fait, c'est le statut entier de la femme qui changea à cette période du fait de la philosophie Néo-Confucianiste. Durant ce temps, les femmes samouraïs étaient le plus souvent les épouses ou les filles de nobles guerriers ou généraux. Mais ces hommes étaient devenus de simples bureaucrates et les femmes de ces nobles familles subissaient de sévères restrictions.
Pour faire court, durant ces deux siècles, la femme n'avait pas plus d'autorité ni de droits qu'un petit enfant. Elles devaient une obéissance et une dévotion totale à leur époux et ne pas hésiter à se sacrifier pour l'honneur de la famille. 

La fin du Shogunat et les dernières onna-bugeisha 

Cependant, au milieu du 17ème siècle, la situation changea de nouveau pour les femmes guerrières. Avec la venue du Shogunat Tokugawa, on trouva de nouveau utile d'armer et d'entraîner les femmes au combat. Des écoles de maniement du naginata pour femmes ouvrirent dans tout l'Empire et le nombre de femmes en capacité de combattre augmenta considérablement ! 
Durant une courte période, les femmes devinrent les gardiennes de leurs villages, les protégeant au prix de leur vie. Ces femmes guerrières se déplaçaient en bande et s'occupaient des menaces elles-même, loin de la domination des hommes de ces derniers siècles. Vers le 18ème siècle, le clan Tokugawa s'opposa à l'Empereur. En réponse à cette menace, un corps d'armée de femmes fut créé et c'est Nakano Takeko qui en prit le commandement. 
nakano
Nakano Takeko
Très intelligente, et douée au maniement du ko-naginata, Nakano Takeko est donc choisie pour être le leader de l'armée de femmes que l'on nommait Joshitai. Son armée était indépendante des autres, mais devaient joindre celle des samouraïs hommes durant la bataille d'Aizu (sans se mélanger car il était hors de question de mêler les hommes et les femmes au combat). Nakano Takeko fut malheureusement tuée au combat, touchée en plein cœur, mais elle eut tout de même le temps de tuer un nombre considérable d'adversaires avec son ko-naginata.
Juste avant de mourir, la femme guerrière demanda à sa soeur, Nakano Yuko de la décapiter afin que l'ennemi ne se serve pas d'elle comme d'un trophée. Sa tête fut enterrée dans les racines d'un pin au temple Aizu Bangemachi où un monument a été érigé en son honneur.
Cette bataille qui a marqué le début de l'ère Meiji sonna la fin du Shogunat, mais aussi celui des onna-bugeisha ! 
mononoke
Si la société japonaise semble assez en retard sur le sujet de l'émancipation de la femme, l'Histoire nous rappelle tout de même que l'univers des samouraïs n'était pas seulement réservé aux hommes ! Aujourd'hui, ces onna-bugeisha sont devenues le symbole de la place qu'occupait la femme japonaise jadis. Les onna-bugeisha inspirèrent également de nombreux artistes de la pop culture japonaise. On peut citer par exemple la Princesse Mononoké, mais aussi la plupart des personnages féminins de l'univers d'Hayao Miyazaki qui sont souvent forts et indépendants comme l'étaient ces femmes guerrières inspirantes. 

41 500 estampes et 1100 livres numérisés retracent l'histoire du Japon


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Cet été, la bibliothèque anglaise Freer|Sacker Library s’est trouvé une belle occupation : numériser et mettre en ligne gratuitement sur son site internet plus de 1100 livres et 41500 images japonais, datés des années 1600 à 1912. Elle retrace ainsi une partie de la riche histoire du Japon. 


View of Mt. Fuji de Fugaku Hyakkei

Les 1100 livres et 41500 estampes qui appartenaient au collectionneur Charles Lang Freer, industriel et collectionneur d'art au 19e siècle, se trouvent en ligne, sur le site internet de la Freer|Sacker Library. L’accès est gratuit. Le projet a été financé par le fonds Anne Van Biema, chargé de promouvoir les arts visuels japonais.
Les livres ainsi que les images datent des époques Edo (1600-1868) à Meiji (1868-1912). Ils traversent l’histoire du Japon, depuis la mise en place d’une politique d’isolement volontaire appelée sakoku jusqu’au début d’une politique de modernisation du Japon.
On trouve aussi beaucoup d’auteurs du mouvement artistique japonais de l’époque Edo : le Ukiyo-e (qui signifie image du monde flottant) comme Ogata Kōrin (1658-1716), Andō Hiroshige (1797-1858) ou encore Katsushika Hokusai (1760-1849). La peinture narrative est originale et les estampes sont gravées sur bois. Même si l’on ne comprend pas le japonais, il est possible d’admirer la calligraphie ainsi que les images traditionnelles de ces époques.
De surcroît, on trouve des volumes tels que One Hundred Views of Mt. Fuji de Hokuasai ou encore Thirty-Six Popular Actors de Utagawa Toyokuni. Les centaines de librettos de théâtre (un style traditionnel du théâtre japonais), de la collection de l’artiste et designer Kōetsu sont aussi disponibles.
  La Freer|Sacker Library ainsi que la gallerie Arthur M. Sackler composent le musée national d’art asiatique de la Smithsonian Institution.
Via le Blog de la Freer|Sacker Library, Open Culture

Pourquoi les Budo japonais sont-ils si bien implantés en Europe ?




Avant de s'attaquer au cœur du sujet, il me parait très important de rappeler que dans la culture populaire, la juxtaposition du mot Art et de l'adjectif martial (de Mars, dieu de la guerre : qui dénote une attitude belliqueuse) est souvent faite afin de décrire spécifiquement et séparer les systèmes de combat orientaux, en particulier japonais de ceux issus d'autres pays. On peut bien évidemment se questionner sur la pertinence d'un tel choix sur les raisons ayant conduit à l'utilisation d'une telle expression puisque l'Occident lui-même n'a jamais été en reste en ce qui concerne les techniques guerrières. Les nations européennes à géographie variable ont de tout temps été en conflit les unes avec les autres, et ce, jusqu'à très récemment. Pourtant, malgré cet héritage et les efforts de quelques groupes d'amateurs, il est beaucoup plus rare de voir des individus passer leur weekend à manœuvrer de lourdes épées à deux mains sous des armures de plates que des pratiquants nu-pieds en pyjamas blancs. L'aspect récréatif des disciplines guerrières occidentales existe pourtant lui aussi depuis des lustres avec en particulier les fameux lutteurs grecs et les jeux de l'Olympe.
Quoi de neuf sous le soleil donc ? Pourquoi, dans ce contexte martial déjà fourni, a-t-on vu se développer une soif aussi intarissable pour les disciplines martiales extrême-orientales ?
A mon avis, il faut en fait chercher la raison non pas dans les points communs entre les disciplines, mais bien dans ce que les pratiques martiales japonaises avaient d'inédit par rapport aux autres. Évidemment, c'est bien de leur part morale/religieuse intrinsèque dont je veux parler et le fait que dans ces disciplines, elle est intimement liée à l'aspect purement physique, comme les deux côtés d'une même pièce. La différence marqua d'autant plus les Occidentaux que jusque-là, même les deux ennemis jurés, Science et superstition religieuse s'entendaient au moins (mais pour des raisons différentes) sur le fait que corps et esprit étaient totalement distincts. Ces qualités intrinsèques des Budo aux yeux des Occidentaux leur ont donc fait mériter la qualification d'Art.
D'un point de vue purement physique à présent, on peut également citer la part de répétition chorégraphiée (kata, 型) et l'absence de compétitions qui font que l'on différenciera les « Arts martiaux » des « disciplines » martiales ou des « sports » martiaux.
Il est en outre intéressant de noter que ces pratiques qui sont plusieurs fois centenaires n'ont été introduites en Europe que très tardivement, bien après que les premiers contacts commerciaux et politiques entre l'Europe et le pays du soleil levant aient commencé. À mon sens, ceci est peut-être dû à deux principaux facteurs. L'un est le protectionnisme évident des Japonais vis-à-vis de leurs « secrets », en particulier guerriers. Même au sein du Japon, la transmission des techniques de guerre secrètes au sein des koryu (古流) se faisait de façon extrêmement sélective et stricte. Je tiens cependant à noter que le sujet qui nous intéresse aujourd'hui est bien la diffusion des budo et pas la transmission ou non des koryu. L'autre raison, à mon avis encore plus importante, est que pendant tout ce temps, les Occidentaux n'étaient peut-être pas « prêts » à recevoir l'enseignement proposé ou bien n'y voyaient pas l'intérêt que nous et nos contemporains, y portons.
De nos jours, en temps de paix, la recherche est différente, l'efficacité est secondaire et le façonnage de l'homme est plus important que celle de ses techniques de survie. Ceci est étonnamment proche avec ce qui s'est passé au Japon au lorsque le Bakufu (幕府) des Tokugawa (徳川, 1603-1867) assurait une relative stabilité et la paix dans tout le Japon.
N'ayant plus à être applicables uniquement sur le champ de bataille, mais dans des situations plus variées (en duels, à la cour, etc.), les arts martiaux purent donc se diversifier et s'enrichir. Pour des raisons de caste et de stricte étiquette, les Samouraïs (侍), qui n'avaient plus à se battre en ces temps de paix, n'étaient pourtant pas autorisés à exercer un autre métier que celui de la guerre. Au même titre qu'en Grèce bien avant ou à la Renaissance en Europe, la réflexion des Bushis (武士) est née de l'oisiveté engendrée par leur charge. La brutalité put faire place au raffinement et l'efficacité martiale au développement personnel. A titre d'exemple, Yamamoto Tsunetomo (山本 常朝), l'auteur du livre de référence sur le Bushido (武士道): Hagakure (葉隠) compilé entre 1709 et 1716 ne s'est très probablement jamais trouvé sur un champ de bataille.
Une question importante : peut-on pourtant appliquer ce parallèle à notre situation en Europe au moment où les arts martiaux japonais s'implantèrent ? Je le pense évidemment. Chez nous, à une époque où les canons et les avions avaient remplacé les sabres et les chevaux, et après une guerre mondiale où tous s'étaient accordés à dire « plus jamais ça », la voie était donc devenue libre pour que le message des Budo passe sans plus trop souffrir trop de leur encombrant carcan martial. On ne se préparait donc plus à la guerre, mais bien à la paix. On cherchait à devenir un être meilleur, plus juste, via l'exécution et le polissage inlassable de techniques de combats codifiées et qui pour beaucoup, n'avaient pas subi l'épreuve pratique du champ de bataille depuis bien longtemps. L'engouement fut total.

Si l'on veut remonter au plus loin dans l'implantation des Budo (武道) en Europe, il faut s'attarder sur un des plus célèbres personnages de son temps et qui s'illustra à plusieurs reprises par son utilisation de techniques de combat « exotiques » et « justes » face à des rufians sans foi ni loi. Je veux bien sûr parler du grand Sherlock Holmes et de son Bartitsu (Écrit « baritsu » dans le livre, un art martial qui sauva maintes fois Holmes et de la façon la plus notable lorsqu'il eut à faire face à son ennemi juré, le professeur James Moriarty dans « The Final Problem »). Sir Arthur Conan Doyle, le créateur de Holmes, avait en fait été en contact avec un certain Edward William Barton-Wright, un ingénieur Anglais qui avait passé trois ans au Japon et était retourné en Angleterre en annonçant la création d'un nouvel art d'auto défense, ceci dès 1898. Il fut sans doute le tout premier occidental à enseigner un art martial en Europe. Son approche était révolutionnaire et consistait en un mélange total des genres et des disciplines et il fut le tout premier organisateur de combats de « mixed martial arts », ce qui le fit précéder Bruce Lee et son Jeet Kune Do ainsi que la famille Gracie de bien 70 ans. Après le travail de quelques pionniers comme Barton-Wright, ce fut au tour d'instructeurs japonais de venir en Europe pour enseigner. De façon encore plus significative, ce sont les systèmes grandement influencés par la pratique des arts martiaux japonais créés par des instructeurs tels que Bill Underwood et William Fairbairn qui deviendront les bases du « close-combat » et qui seront pratiqués par la majeure partie des armées occidentales à partir de la Seconde Guerre mondiale et durant tout le 20e siècle.
Documentaire sur le Bartitsu
C'est ce nouveau pragmatisme qui fut instrumental à la diffusion incroyable des arts martiaux Japonais en Europe alors que les formes locales telles que la boxe, l'escrime, la canne ou la savate avaient depuis longtemps déserté les rues aux profits des salons mondains en devenant des sports, cette activité récente développée au sein de l'élite sociale de l'Angleterre industrielle du XIXe siècle et sensée être bénéfique pour le corps. La grosse différence entre le sport antique et ce sport moderne tenait à la notion de « record ». Philippe Lyotard, un historien de l'université de Montpellier dit à ce sujet : « Il y a une coupure très nette entre le sport moderne et le sport antique : c'est la notion de record (et donc de performance). Le record et la performance expriment une vision du monde qui est profondément différente entre les Grecs et les modernes. La culture du corps est différente. Pour les Grecs, cette culture est rituelle, culturelle, d'inspiration religieuse, pour les modernes, le corps est une machine de rendement. » Nous voici donc précisément sur le point le plus important en ce qui concerne ce que les arts martiaux avaient à proposer.

On pourrait même finalement presque parler d'un « retour aux sources » du sport antique via le truchement d'une discipline étrangère. Évidemment, en plus de l'attirance purement physique, c'est le côté « gentleman » des combattants de l'époque qui a été séduit par le message un brin nombriliste de perfection et de recherche de soi des arts martiaux japonais. L'artiste martial est donc axé sur sa propre personne et cet égocentrisme qui n'est pas nouveau est toujours autant d'actualité, la lecture de ce blog et de celui de mes collègues ne laissera aucun doute à ce sujet. L'esprit chagrin pourra donc remarquer qu'en Arts martiaux tout comme en sport, on s'écharpait donc toujours joyeusement, car l'efficacité était au centre de la recherche, mais cette fois, on le faisait tout en se regardant le nombril...
On l'a donc vu, les deux aspects dualistes des arts martiaux Japonais, l'efficacité martiale et la volonté de devenir meilleur trouvèrent des échos très rapidement en Occident, la machine était lancée et une nouvelle industrie créée. Au-delà des bénéfices de la pratique de telles disciplines, leur exotisme achèvera d'attirer l'attention des foules. C'est d'ailleurs à cette époque que les premiers récits au sujet de l'extrême orient font vibrer les foules avec en particulier les travaux d'écrivains expatriés tels que l'Irlandais Lafcadio Hearn ou Arthur May Knapp. C'est donc peu surprenant de constater l'expansion des arts martiaux japonais à une époque ou c'est l'occident tout entier qui s'enthousiasme pour l'Orient.
La différence entre Budo et sport est donc clairement établie, mais comme souvent, on va s'apercevoir que tout n'est pas si simple. Effectivement, un autre phénomène à ne surtout pas laisser de côté est l'orientation progressive du Budo vers le « sport » dans sa définition moderne. Ce « glissement » est d'ailleurs vertement critiqué par les aficionados de techniques « ancestrales ». La critique est bien entendu fondée, mais il ne faut tout de même pas oublier que c'est cette mutation qui a permis la diffusion des arts martiaux comme le Karaté et le Judo pour ne citer que ces deux-là. On fustige bien souvent « la culture de masse » et le « pratiquant lambda » en oubliant volontiers que l'extrême majorité d'entre nous est composée de pratiquants lambda qui n'auraient jamais mis un pied sur un tatami si le phénomène que nous renions n'avait pas eu lieu. N'en déplaise à ceux qui nourrissent des fantasmes guerriers et se croient supérieurs aux autres pratiquants qu'ils qualifient donc de « lambda », nous sommes, à très peu d'exceptions près, tous des guerriers du dimanche. C'est d'autant plus marquant que les grands budoka eux-mêmes sont allés dans cette direction. La relation entre Jigoro Kano et le baron de Coubertin (voir la lettre) est un exemple flagrant, le premier allant même jusqu'à modifier les règles du randori en 1909 après une rencontre avec le baron, très vraisemblablement dans le but de faire entrer le Judo au sein des disciplines olympiques. Le maître Ueshiba lui-même a bien adopté ensuite le système de ceintures développé par Kano.
Je souhaiterais terminer par un aspect que l'on pourrait avoir tendance à oublier ou occulter : le message religieux des arts martiaux. Qu'ils soient baignés dans le Shintoïsme, le Bouddhisme ou le Zen, tous les arts martiaux japonais ont en commun ce message moral et religieux. À une époque où les religions monothéistes déclinent en Europe, il est donc logique que les gens cherchent des réponses ailleurs à leurs questions existentielles et métaphysiques. Puisque l'homme semble avoir des difficultés à se créditer lui-même d'une moralité intrinsèque (pourtant totalement involontaire et explicable en termes de bénéfices évolutionnaires), il a fallu qu'il remplace les règles imposées par les religions par autre chose, probablement de peur que la bête en lui ne se déchaîne en l'absence de chaînes dogmatiques. L'un de ces ersatz est l'idéal du Bushido. Cela dit, on peut considérer comme un grand progrès moral le fait que dans les arts martiaux japonais, ce n'est pas une peur de la punition divine qui pousse un individu à être bon, mais bien un désir d'harmonie émanant de l'individu lui-même. Étrangement, on voit à présent l'apparition de nouveaux systèmes de combats se sentant obligés de se donner une respectabilité via la religion. Je me souviens encore de l'expression employée par Mikhail Ryabko (un des grands promoteurs du Systema) disant : « Il n'y a pas d'athées dans les tranchées ». L'influence du Catholicisme dans le Systema est évidente, en particulier si l'on s'approche des instructeurs vivant toujours à l'Est. La religion est-elle nécessaire pour apprécier le Systema ? Je ne le pense pas. Je ne crois pas non plus que monsieur Ryabko soit le genre d'individu qui prône à tendre l'autre joue. Mais ceci est un tout autre débat que je traiterai plus tard...
Pour conclure, je tiens à souligner que même si les arts martiaux sont arrivés relativement tardivement en occident et ont réussi à l'influencer de façon significative, on peut dire que le contraire est vrai également. Le développement des budos vers la moitié du 20e siècle a achevé la mutation des arts martiaux vers une pratique plus accessible, plus universelle et aussi plus riche mentalement au-delà du bagage technique. Pourtant, il est très possible que l'ouest ait influencé l'est sans le savoir, car il est évident que des gens comme les maîtres Ueshiba, Funakoshi et Kano ont été influencés, entre autres, par la pensée humaniste occidentale et la vision moderne du sport lors de la création de leurs disciplines. C'est peut être pourquoi le message d'arts martiaux comme l'Aikido nous semble si pertinent à nous Occidentaux et résonne chez nous peut être même plus fort que dans son pays d'origine. Enfin, même si les arts martiaux japonais ont fait office de précurseurs à la nouvelle recherche martiale occidentale, c'est aujourd'hui de nombreuses disciplines provenant de bien des pays différents qui déferlent sur l'Occident (Kung Fu, Taekwondo, Viet vo dao etc.). Il sera, je pense, très intéressant de voir comment les arts martiaux évoluent dans les décennies à venir maintenant que le meilleur de l'ouest et de l'est peut être mis dans le même creuset. Lors de cette évolution, on perdra peut-être un peu de technique, ou de pureté mais je pense sincèrement que le bénéfice pour l'homme en vaudra la peine.

Biographie d'André Nocquet, le premier élève étranger d'O Sensei Ueshiba Morihei | Histoire de l'Aikido

Jeunesse en France et découverte des arts martiaux


Auguste Nocquet Sensei est un enseignant d'Aikido Français né le 30 juillet 1914 à Prahecq dans les Deux-Sèvres[1]. Il est issu d'une famille d'agriculteurs qui ont su lui enseigner les valeurs fondamentales de l'amour de la terre et de la simplicité[2]. C'est à Niort, à une dizaine de kilomètres de la ferme familiale qu'il commence ses études, avant de poursuivre à l'école nationale des sous-officiers d'active (ENSOA) de Saint-Maixent-l'Ecole. Là-bas, vers 1929, il a l'opportunité d'apprendre de l'adjudant-chef Raffier des techniques de défense à mains nues tout à fait inédites, ce dernier ayant des connaissances en Ju-jutsu, un art martial assez confidentiel provenant du Japon. Seule une poignée d'Occidentaux connaissaient le Ju-jutsu car à l'époque, le Japon est sous un régime isolationniste assez strict. Cette expérience laisse une forte impression sur l'adolescent ainsi qu'un fort désir d'en apprendre plus à propos de ce pays lointain et de ses techniques guerrières.
Cette passion du jeune André pour la culture du corps s'explique en partie par une volonté de compenser sa petite taille[3]. D'un naturel déjà trapu, il repoussera ses propres limites physiques via la pratique de la lutte gréco-romaine. La découverte inattendue d'un manuel de culturisme appartenant à son père, lui-même sportif accompli, écrit par le pionnier Allemand et fondateur du culturisme moderne, Eugen Sandow, le mis formellement sur la voie[3]. Comme il l'a fait tout au long de sa vie, André Nocquet se consacre totalement à cette passion et il intègre tout autant les principes de performance que la sensibilité esthétique de Sandow, se sculptant lui-même un corps tout à fait remarquable.
L'idée bourgeonne également dans son esprit de vivre de sa passion et malgré les réticences initiales de son père qui aurait voulu que son fils s'occupe de la ferme familiale, André Nocquet se dirige plutôt vers des études pour devenir professeur de gymnastique. Ayant réussi à convaincre ses parents, il part donc en 1932 pour Paris afin de suivre les cours à l'école Desbonnet située au 55 rue de Ponthieu, près des Champs Élysée. Il suit aussi les cours du docteur Boris Dolto, pionnier de la kinésithérapie moderne. Il est intéressant de noter qu'Edmond Desbonnet a largement contribué à introduire en France le Bartitsu[6] d'Edward William Barton-Wright, un art fortement influencé par le Ju-jutsu japonais[7]. Pendant un temps, Desbonnet a même mis en place des classes régulières de Ju-jutsu[7] et bien qu'à l'époque à laquelle André Nocquet arrive rue Ponthieu, les classes de Ju-jutsu ont cessé, il n'est pas fortuit de penser qu'il ait pu continuer à recevoir une instruction en Ju-jutsu là-bas.

Son apprentissage terminé, les brevets de gymnastique et de kinésithérapeute en poche, André Nocquet quitte la capitale et ouvre en 1936 un cabinet de culture physique et de thérapie dans la ville d'Angoulême. Les arts martiaux ne tardent pourtant pas à reprendre le devant de la scène dans sa vie et il commence en 1937 à faire de fréquents allers et retours jusqu'à Paris pour étudier le Ju-jutsu sous la direction du docteur Moshé Feldenkrais, le fondateur du Jiu-jitsu Club de France. Ce dernier ayant, deux ans plus tôt, obtenu du célèbre Kawaishi Mikonosuke qu'il vienne s'installer en France pour y enseigner le Judo, et André Nocquet devient également en 1938 le 17e élève de Kawaishi. André Nocquet se révèle un élève brillant et il s'illustre sur les tatamis à l'entrainement aussi bien qu'en compétition[2], pourtant, bientôt, la Seconde Guerre mondiale vient mettre un terme à cette aventure.

Période de la Seconde Guerre mondiale

Au début de la Seconde Guerre mondiale, André Nocquet est incorporé au 404e Régiment de Défense contre Avions, mais il est fait prisonnier lors de la bataille de Dunkerque le 4 juin 1940 près de Malo-les-Bains. Il est transféré de prison en prison, souffrant de privations de toutes sortes, ce qui amoindrit gravement son état physique. Après plusieurs tentatives infructueuses, il réussit finalement à s'échapper du stalag VI de Cologne-G le 11 octobre 1943 et revient en France sous le pseudonyme de Jean Hervé, où il rejoint les Forces françaises de la Résistance. Une fois la guerre terminée, il se voit attribuer la Médaille des Évadés, ainsi que la Croix de combattant.

La pratique de l'après-guerre

En 1945, André Nocquet, de retour dans le Sud-Ouest, reprend son activité professionnelle à Angoulême. Le 12 septembre de cette année-là, il reçoit de Kawaishi la 56e ceinture noire du pays en Judo et en Self-défense et il crée le premier club de Judo de la région, d'où il forme à son tour près de 40 ceintures noires. La police de Bordeaux s'intéresse rapidement à cet individu exceptionnel et lui demande de former ses instructeurs de Judo et de Ju-jutsu.
Au cours de son étude du Judo, en 1949, Nocquet découvre une nouvelle discipline appelée l'Aikido. Elle est démontrée par Mochizuki Minoru lorsque celui-ci est invité par Kawaishi. La circularité, l'élégance, et le raffinement des techniques d'Aikido, l'absence de chutes plaquées font une forte impression sur Nocquet[3]. Surtout, l'absence de saisies et de positions pré-arrangées lui fait prendre conscience que pour se défendre dans la rue, une connaissance des techniques de l'Aikido peut être très complémentaire à ses acquis de Judo[3]. Il décide de se consacrer à l'apprentissage de cette discipline nouvelle et il devient immédiatement l'élève de Maître Mochizuki[3]. L'approche assez cartésienne de Mochizuki, fruit de son travail d'adaptation de l'enseignement traditionnel Japoanis au public occidental, plait bien à André Nocquet, et il étudie passionnément avec lui jusqu'à ce que ce dernier ne quitte la France en 1952[5]. La charge de la coordination Aikido en Europe continentale est ensuite attribuée à Abe Tadashi, dont l'Aikido semble encore plus impressionnant à Nocquet, bien qu'un peu plus incisif, voire violent. André Nocquet poursuit donc son étude de l'Aikido avec Abe, qui lui attribue le premier Dan en 1954. Nocquet, désormais 4e Dan de Judo et 1er Dan d'Aikido, fonde des clubs les villes de Bordeaux et Biarritz, et il y enseigne jusqu'en 1955, assurant la promotion de plus de 200 ceintures noires.

Voyant son enthousiasme hors du commun et conscient de ses capacités, Abe conseille à André Nocquet de se rendre au Japon pour apprendre l'Aikido à la source auprès de O Sensei Moriheï Ueshiba[3][5]. Nocquet, qui s'occupe alors d'un dojo de 300 élèves à Bordeaux met du temps à se laisser convaincre, mais après quelques mois, il accepte finalement[3]. Sous la tutelle du ministère français des Affaires culturelles et les conseils de l'académicien français Georges Duhamel, ami de la famille Nocquet[3], André Nocquet est chargé de se rendre au Japon dans le but de renforcer les relations bilatérales établies par l'Accord culturel franco-japonais. Duhamel, qui a à plusieurs reprises voyagé au Japon, et est à l'origine de l'accord, prend le rôle de mentor pour Nocquet avant son départ, le mettant en garde au sujet du choc culturel à venir, et lui conseillant de se rendre à sa destination en bateau puisque, selon lui « Il faut savoir mériter le Japon par petites étapes ». La mission de Nocquet est d'étudier l'Aikido en tant que tout premier élève étranger vivant au dojo (uchi deshi) avec le fondateur, Ueshiba Moriheï. Il est aussi chargé d'apprendre des méthodes peu connues de thérapie physiques telles que le shiatsu, et seitaijutsu sous la direction de maîtres tels que Nishi Katsuo. Le journal « Sud-Ouest » lui demande également de servir en tant que correspondant au Japon.

Départ pour le Japon


André Nocquet part pour le Japon en juin 1955, à l'âge de 40 ans. Suivant les conseils de Duhamel, il prend le bateau, et prend cartier dans une cabine de quatrième classe[3]. Il profite de la traversée pour enseigner le Ju-jutsu aux officiers, qui en retour, lui prêtent une cabine de première classe lorsqu'il fait trop chaud[3]. Il arrive au Japon au bout d'un mois de traversée[3] et est invité à son arrivée au ministère des Affaires étrangères, où il est officiellement accueilli par M. Kuni Matsuo, le rédacteur en chef adjoint du journal Yomuri. André Nocquet ne parle pas du tout le japonais, mais il maîtrise relativement bien l'Anglais, ce qui lui permet de trouver ses marques rapidement[2]. Il est très surpris d'apprendre que ses hôtes ne savent rien de l'Aikido, Ueshiba n'enseignant qu'à un cercle restreint d'élèves issus des hautes classes de la société Nippone[2]. Il se rend donc sans délai au siège de l'Aikikai de Tokyo afin de rencontrer Ueshiba Morihei.

La routine quotidienne au Hombu Dojo

Ueshiba Morihei, lui, ne parlant pas d'autre langue que le Japonais, la communication est un peu plus difficile, mais heureusement, le philosophe francophile Tsuda Itsuo, est dépêché par Duhamel pour assurer la traduction. Selon Nocquet, Ueshiba aurait dit « Il est difficile de faire comprendre l'Aikido à monsieur Nocquet, je vais donc lui apprendre lorsqu'il dort, et qu'il ne peut pas répondre »[3]. Piqué d'intérêt pour le vieil homme et ses techniques extraordinaires, Tsuda lui-même commencera son étude de l'Aikido après le départ d'André Nocquet, vers 1961[5].
Les conditions de vie et d'enseignement sont très difficiles pour André Nocquet, il dort à même le sol, sur le tatami de paille et s’entraîne chaque jour durant 5 heures avec les 20 autres élèves réguliers[3]. L'enseignement est très différent de ce dont il a l'habitude. Alors que Mochizuki et Abe ont adopté une approche très systématique et pédagogique de l'enseignement, au Hombu Dojo, il s'agit de répéter le même mouvement, sans explications, jusqu'à l'épuisement[3]. André Nocquet vit avec la famille de Ueshiba Kisshomaru, ainsi qu'avec les uchi deshi Tamura Nobuyoshi et Noro Masamichi. Ces derniers deviennent rapidement les partenaires favoris d'André Nocquet[3] même si la pratique est parfois assez physique[3]. Les quelques autres étrangers qui suivent les cours de Maître Ueshiba Morihei sont en majeure partie des Américains qui ne vivent pas au dojo et ne viennent que de façon épisodique[3]. Le dojo vient effectivement juste de reprendre ses activités après que l'interdiction de pratiquer les arts martiaux fixée par le général MacArthur a été levée via le traité de San Francisco de 1951.

Tous les jours, la même routine est suivie, André Nocquet se lève à 5h et commence à nettoyer le dojo pendant une heure, suivie d'une première heure d'entrainement à 6h15, puis une seconde, après une demi-heure de pause. Ueshiba Kisshomaru, le fils de O Sensei, dirige la majorité des premiers cours du matin, même si des élèves avancés comme Tada Hiroshi contribuent également. O Sensei enseigne aussi de façon impromptue lorsqu'il se trouve à Tokyo. Le petit déjeuner vient seulement après le second cours, et même si le besoin de nourriture est intense, Nocquet admet ne jamais vraiment s’être habitué à manger du poisson mariné pour le petit déjeuner. Il développe même de l'urticaire géante à plusieurs reprises en réaction à ce régime inhabituel[3]. La collation est suivie par une pratique libre jusqu'à l'heure du déjeuner préparé pour les uchi deshi par l'épouse de Kisshomaru. Ce sont des occasions pour parler plus librement avec le maître Ueshiba, même si André Nocquet a constamment besoin de l'appui de Tsuda Itsuo. À 16h, l'entrainement reprend sous la direction de l'un des instructeurs du dojo tel que Koichi Tohei, le directeur technique de l'Aikikai, Okumura Shigenobu, Osawa Kisaburo, et Tada Hiroshi[5]. Le cours est suivi d'une pause de 30 minutes jusqu'à 17h, et enfin, d'une dernière heure de keiko pour conclure la journée.
Nocquet et Tohei au Hombu Dojo (photo aimablement fournie par Kobayashi Yasuo Shihan)

Les débuts de la reconnaissance internationale de l'Aikido

La famille Ueshiba est plutôt pauvre à l'époque et même si l'Aikido était, avant la guerre, essentiellement enseigné aux membres des hautes classes de la société japonaise, il faut maintenant un soutien extérieur si l'organisation veut perdurer. Selon Okumura Shigenobu, c'est l'arrivée d'André Nocquet qui a vraiment marqué la reprise de l'activité médiatique au dojo, les journalistes domestiques et internationaux se prenant d'intérêt pour les aventures extraordinaires de cet homme d'âge mûr[8]. Ueshiba demande d'ailleurs à André Nocquet de faire jouer ses contacts et mettre en place un évènement officiel pour présenter l'Aikido aux dignitaires étrangers présents au Japon. André Nocquet organise donc un évènement le 28 septembre 1955 au Hombu Dojo de l'Aikikai à Tokyo et invite tous les représentants culturels des ambassades étrangères. Ueshiba donne une conférence sur les idéaux spirituels de l'Aikido, suivie d'une démonstration. L’évènement est un succès et il a une portée qui va bien au-delà de Tokyo et du Japon. Il s'agit en fait du point de départ de l'engouement incroyable de l'extérieur pour l'Aikido. Un certain nombre d'articles de journaux ont été écrits suite à l’événement et Tada Shihan m'en a gentiment fait cadeau. Vous pouvez en lire des traductions ici.
Article de journal Japonais sur André Nocquet (article aimablement fourni par Tada Hiroshi Shihan)

D'autres expériences martiales et des reconnaissances officielles

Dans ses temps libres, Nocquet étude la self-défense avec Tomiki Kenji, fondateur du style d'Aikido Tomiki, et instructeur en chef aux quartiers généraux du Judo, le Kodokan. Il étudie aussi brièvement le Karaté Kyokushin avec Oyama Masutatsu, mais il est bientôt rappelé à l'ordre par Ueshiba, qui lui dit qu'il est venu de se concentrer sur l'Aikido. Il arrête donc sa formation avec Oyama, ce dernier comprenant très bien que la pratique simultanée de ces deux disciplines exigeantes n'est pas réalisable. En 1957, André Nocquet est officiellement promu au titre de shidoin (instructeur) du Hombu Dojo de l'Aikikai, et il reçoit également un diplôme de self-défense de la part de Tomiki.
André Nocquet reçoit aussi un diplôme de shiatsu de Namikoshi, le président de l'école internationale de Shiatsu de Tokyo, et il est prié par Nishi Katsuo d'enseigner les principes des systèmes de santé japonaise aux fonctionnaires français.
André Nocquet entouré des deshi du Hombu Dojo (photo aimablement fournie par Kobayashi Yasuo Shihan)

Départ du Japon et de retour en France

Nocquet quitte le Japon en octobre 1957 depuis le port de Yokohama pour rejoindre San Francisco via Hawaii[8]. Sur son chemin de retour, il s'arrête aux États-Unis d'Amérique et enseigne l'Aikido au Département de police de Fresno. Son pays natal lui manquant, il retourne finalement en France durant l'été 1958.
Départ depuis le port de Yokohama
À son retour en France, André Nocquet commence immédiatement à enseigner. Il lui est également demandé d'écrire un volumineux dossier pour le ministère de l'Éducation mettant en parallèle ce qu'il a appris au Japon avec les techniques martiales traditionnelles européennes depuis le 15e siècle.
Depart de Nocquet au port de Yokohama (photo aimablement fournie par Kobayashi Yasuo Shihan)

Fonctions officielles en tant que représentant de l'Aikikai et organisation de l'Aikido en France et en Europe

Quand Abe Tadashi retourne au Japon en 1960, il décerne a Nocquet le grade de 4e Dan et le désigne comme son successeur. Le 16 avril 1962, cette responsabilité aurait été officialisée par Ueshiba Moriheï lui-même et il aurait envoyé à Nocquet une demande officielle pour devenir le représentant général du Hombu Dojo de l'Aikikai pour la France. Le titre lui aurait été remis par Murashige Aritomo avec le grade 5e Dan Aikikai. J'emploie volontairement le conditionnel ici car plusieurs versions existent au sujet des grades et diplômes d’André Nocquet et pour l'instant, je n'ai pu trouver de preuves concrètes accréditant l'une ou l'autre (je vous encourage à lire la discussion dans les commentaires ci-dessous car elle apporte des éléments nouveaux).
Murashige Aritomo démontrant un kata de Iai devant André Nocquet
Nocquet accueille l'arrivée en France de deux de ses anciens partenaires, Noro Masamichi en 1961, et plus tard, Tamura Nobuyoshi en 1964. Les deux hommes sont envoyés afin d'aider à développer l'Aikido en France et dans le reste de l'Europe. La présence sur le territoire de tant d'instructeurs de haut niveau exacerbe les tensions au sein d'une communauté d'Aikidoka déjà hétérogène, et a conduit à des scissions et des divergences d'opinions qui sont encore vives aujourd'hui[8].
Avec l'aide d'instructeurs en Belgique, Italie, Allemagne et Suisse, André Nocquet fonde la Fédération européenne d'Aikido. Il a reçoit le 7e Dan Aikikai le 6 juillet 1973 des mains de Kobayashi Hirokazu. La même année, il travaille avec Mochizuki Hiroo (le fils de Mochizuki Minoru) et Tamura Nobuyoshi à la formalisation d'un programme d'enseignement de l'Aikido qui est toujours en place aujourd'hui, ainsi qu'à la mise en place d'un diplôme reconnu par l'État d'instructeur en Aikido.
Nocquet enseigne à la plupart des professeurs actuels de haut rang d'Aikido, ainsi qu'aux soldats de l'Union Nationale Parachutiste, et aux fonctionnaires de la police nationale. Nocquet continue à enseigner l'Aikido et à œuvrer pour la diffusion de ses idéaux pacifistes à travers des cours et des conférences qu'il donne dans toute l'Europe.

À partir de 1975, André Nocquet commence la rédaction de son premier livre sur l'Aikido, relatant son expérience au Japon, il y publie une collection de photos inédites d'Ueshiba Moriheï. Nocquet participe en 1976 à la création de la Fédération internationale d'Aikido. L'Association pour le Développement de la Recherche sur le Cancer, et les Professeurs Lucien Israël, Georges Mathé, Léon et Maurice Tubiana Schwarzenberg lui remettent le diplôme de l'Association pour soutien qu'il apporte à leur initiative. Il reçoit le titre de Chevalier de l'Ordre national du Mérite le 10 juillet 1982. Il est promu au 8e Dan d'Aikido en 1985 et est fait Chevalier de la Légion d'honneur le 2 avril 1994. En dépit de la fragmentation de l'Aikido en France, André Nocquet ne ménage pas ses efforts pour unifier tous les pratiquants, en partenariat avec Tamura Nobuyoshi. Il retourne au Japon en 1990, pour la première fois depuis 33 ans, afin de présenter l'Aikido Doshu une médaille d'or du Ministère du Sport français.

Décès et héritage

André Nocquet décède le 12 mars 1999 à l'âge de 84 ans et est enterré à Prahecq, sa ville natale. Ses plus proches élèves continuent à perpétuer enseignement de l'Aikido au sein du Groupe Historique d'Aikido André Nocquet qu'il a fondé en 1988, dans le cadre de la Fédération Française d'Aikido et de Budo de (FFAB), dirigée par Tamura Nobuyoshi.

References
  1. Nocquet, André - Maître Morihei Uyeshiba, présence et message. Guy Trédaniel Éditeur. May 2007. ISBN : 978-2-84445-762-2
  2. Article sur André Nocquet datant des années 70
  3. Interview d'André Nocquet pour France Culture (audio)
  4. Douche, Jean François - O Sensei, évocation et Témoignages
  5. André Nocquet Returns to Japan (en Anglais)
  6. Erard, Guillaume - L'histoire de l'introduction des Budo japonnais en Europe
  7. Site officiel du la Bartitsu Society (en Anglais)
  8. Pranin, Stanley - Interview de Shigenobu Okumura (1983) (en Anglais)
  9. Erard, Guillaume - Blocage de la promotion de Christian Tissier au 8e Dan
  10. Nocquet, André - Lettre adressée à monsieur Daniel André Brun (1er Janvier 1972)


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